La crise existentielle que j’ai trouvée dans mon frigo

Vous ne vous attendiez sans doute pas à une leçon de philosophie entre un pot de mayonnaise et une boîte d’œufs. Moi non plus. Mais c’est souvent comme ça que les éveils existentiels surgissent : pas dans l’Himalaya, ni sous un figuier sacré, mais bien face à un bocal d’olives à moitié entamé, sans se souvenir pourquoi on a ouvert le frigo.

La crise existentielle que j’ai trouvée dans mon frigo

Tout a commencé ainsi : j’étais affamé, vaguement déshydraté, un peu triste et émotionnellement ambigu (c’est devenu une routine). J’ai ouvert la porte du frigo et je l’ai fixé, comme si les étagères allaient me souffler un sens à ma vie.

Mais au lieu d’une révélation culinaire, j’ai trouvé autre chose. Quelque chose de froid. D’inconfortable.

Je m’y suis trouvé.


Un frigo, c’est en fait une métaphore de la vie

Déballons ça (jeu de mots voulu). Un frigo, c’est une collection intime de vos choix, de votre paresse, de vos ambitions ratées et de vos illusions. Ce houmous périmé ? Ce sont vos rêves de vingtaine, ceux que vous racontiez aux soirées avant de les oublier dans un coin de votre tête. Le kale pourri dans le tiroir du bas ? Votre tentative de devenir cette personne qui fait du yoga au lever du soleil.

Et le fromage ? C’est votre zone de confort. Douce, molle, et vieillissant de façon discutable.

Sous la lumière blanche du frigo, comme sous un projecteur céleste, j’ai été frappé par une pensée glaçante (et pas seulement à cause du froid) :

Je ne savais absolument pas ce que je voulais.
Ni pour dîner. Ni pour ma vie.


Le mythe de l’humain bien dégivré

On fait tous semblant d’être des garde-manger organisés. Bocaux étiquetés. Contenants empilables. Épices classées par continent.

Mais en vérité, on est tous des congélateurs borderline. Quelque chose fuit. Quelque chose est gelé à cœur. Et quelque chose sent bizarrement le regret.

Et malgré tout, on fait comme si.
On va bosser.
On poste des couchers de soleil.
On se demande : « Comment ça va ? »
Réponse automatique : « Je suis débordé. »

Débordé par quoi, exactement ?
Par la moisissure lente de nos problèmes non résolus ?

Main posée sur une bouteille de moutarde que je ne me souvenais même pas avoir achetée, j’ai vu ma vie avec clarté : une série d’efforts pour faire passer les dates de péremption pour des étapes de développement personnel.


Mais de quoi avez-vous vraiment faim ?

Parce que c’est bien là le cœur du problème, non ?
La faim.

Pas seulement la faim physique, mais la faim émotionnelle, spirituelle, existentielle. La faim d’être vu. De compter. D’être choisi, par le destin ou Tinder — idéalement les deux.

Vous scrollez. Vous consommez. Vous glissez à droite sur des gens à qui vous ne parleriez même pas dans la salle d’attente du dentiste.

Vous assistez à des webinaires. Vous lisez des livres sur la productivité. Vous mangez des amandes au lieu de chips, en espérant que l’autodiscipline fera de vous une meilleure personne.

Mais êtes-vous rassasié ?

Sérieusement.
Est-ce que vous l’êtes ?


Le jour où j’ai failli devenir un cornichon

Il y a eu un moment (ne riez pas) où j’ai envisagé de manger ce vieux bocal de cornichons. C’était un croisement métaphorique. Est-ce que je consomme un truc douteux juste pour apaiser un vide passager ? Ou est-ce que, pour une fois, je laisse la faim me traverser ?

Et là, j’ai compris :
On passe notre vie à essayer de nourrir des faims… qui ne sont même pas des faims.
On mange quand on est triste. On achète quand on est seul. On travaille comme des fous pour éviter le silence. On comble chaque fissure avec du bruit, des distractions, ou des snacks au goût de bacon.

Mais et si on restait avec l’inconfort ?
Et si on ouvrait le frigo, qu’on regardait le bazar, et qu’on restait là — frigorifiés, inassouvis — mais lucides ?


La conclusion (vraiment) surprenante

Vous voulez savoir ce que j’ai fini par manger ?

Rien.

J’ai refermé le frigo.
Je me suis assis.
J’ai écrit ceci.

Et bizarrement, je me suis senti… nourri.

Parce que parfois, ce n’est pas de plus de nourriture dont on a besoin.
Mais d’arrêter d’ouvrir le frigo par habitude et de commencer à s’ouvrir à soi-même.

Et oui, je sais, ça sonne comme une mauvaise accroche de livre de développement personnel.

Mais peut-être — juste peut-être — que la vie fonctionne ainsi :
On est tous des restes qui tentent de ne pas pourrir avant d’avoir trouvé la recette pour laquelle on a été fait.

Alors la prochaine fois que vous ouvrez votre frigo, posez-vous la question :

Est-ce que j’ai vraiment faim ?
Ou est-ce que je fuis encore une fois qui je suis ?

Bon appétit, chers explorateurs de l’absurde.