Intelligence en solde : braderie finale avant extinction programmée
Il fut un temps — pas si lointain — où l’intelligence était une qualité. Une vraie.

On la respectait, on l’encadrait même. Parfois, on lui construisait des bibliothèques. Aujourd’hui, elle gêne. Elle fait tache dans un monde qui vénère l’algorithme, la punchline, et les vidéos de 6 secondes où quelqu’un se prend une planche de paddle dans l’entrejambe. (Spoiler : c’est toujours drôle, mais passons.)
On ne sait plus très bien quoi faire de notre intelligence collective. Elle traîne comme un vieux meuble encombrant dans le grenier de l'humanité. On la dépoussière vaguement quand il s'agit de créer un vaccin en urgence ou de gagner un prix Nobel, mais le reste du temps, on la garde en sourdine, de peur qu’elle ne dérange.
L’intelligence ? Oui, mais pas trop fort s’il vous plaît.
Prenez n’importe quelle conversation en société : il faut paraître informé, surtout ne pas être trop intelligent. Donner l’illusion d’avoir lu un article, mais surtout pas le livre. Faut pas exagérer. Dans les dîners entre amis, celui qui cite Montaigne, Spinoza ou Simone Weil, on l’évite comme une publicité YouTube non skippable. On préfère celui qui raconte sa cure de jus de céleri ou son dernier burnout reconverti en podcast.
Soyons honnêtes : on est une civilisation qui préfère les influenceurs aux professeurs, les tweets aux thèses, et les “j’ai entendu quelque part que…” aux faits. L’intelligence est devenue suspecte. Elle sent le vieux, le poussiéreux, le non-rentable. Et surtout, elle ne clique pas.
Le règne du vide chic
On nous vend du développement personnel, des affirmations positives, des vibrations hautes et du coaching de vie. On vous répète que vous êtes déjà parfait, que votre vérité vaut bien celle de la science, et qu’il suffit de “s’aligner énergétiquement” pour que tout aille mieux. Évidemment, pendant ce temps, la planète chauffe, les démocraties suent, et les cerveaux se liquéfient doucement, un TikTok à la fois.
Mais tout va bien : il y a une promo sur les cristaux de quartz.
On régresse, mais avec panache
On pourrait s’en sortir. Collectivement. Si on mettait ne serait-ce que 1% de l’énergie qu’on utilise à comparer des prix de téléphones dans l’éducation, la lecture, la réflexion, ou les débats d’idées, on serait déjà en train de discuter de Kant dans les files d’attente de chez Lidl. Mais non.
On préfère s’écharper dans les commentaires de Facebook pour savoir si la Terre est plate, si le vaccin contient des antennes 5G, ou si on peut guérir l’anxiété avec du kombucha et un bain de pleine lune.
✍️ Alors on écrit.
Parce qu’on n’a pas trouvé mieux. Parce qu’écrire, c’est résister. C’est poser des mots dans un monde qui crie des bruits. C’est semer quelques graines de lucidité, d’humour, de poésie, dans un champ labouré par la pub, les mèmes, et les débats stériles. C’est dire doucement, mais fermement : je ne suis pas d’accord, et voici pourquoi.
Scribis.net, Substack, ou n’importe quel autre radeau dans l’océan numérique, c’est notre cabane en bois face au tsunami. On écrit parce qu’on n’a pas envie de devenir bête. On écrit pour se souvenir. Pour rire aussi. Parce que quitte à sombrer, autant le faire en citant Camus et en rigolant du fond du gouffre.
Abonnez-vous. Ou pas.
Mais si vous êtes encore là, à lire ces lignes, c’est que tout n’est pas perdu. Peut-être qu’on peut encore sauver deux ou trois neurones. Ou au moins rigoler ensemble avant la fin.