Sommes-nous devenus accros au scroll infini ?

Le scroll infini a changé notre rapport au temps, à l’attention et à l’ennui. Ce simple geste, anodin en apparence, redéfinit la façon dont nous pensons, ressentons et existons. Ce n’est plus nous qui cherchons l’information : c’est elle qui nous cherche… sans fin.

Sommes-nous devenus accros au scroll infini ?

⌛ 1. Une invention banale… au pouvoir colossal

Le scroll infini, ou défilement sans fin, a été inventé en 2006 par Aza Raskin, un designer. À l’époque, il voulait simplement améliorer l’expérience utilisateur. Mais comme il l’a lui-même reconnu plus tard : « J’ai peut-être ruiné l’humanité. »

Chaque fois que vous tirez vers le bas, du nouveau contenu apparaît. Il n’y a plus de fin, plus de limite visible. Et donc plus de raison d’arrêter.


2. Une boucle addictive qui mime les machines à sous

Le scroll infini agit comme une machine à récompenses aléatoires. De temps à autre, une publication capte votre attention, vous fait rire ou vous indigne. Vous en voulez une autre. Puis une autre. Puis encore.

Ce mécanisme est dopaminergique : votre cerveau cherche la prochaine "récompense", et le geste répétitif devient automatique, presque compulsif.


3. L’attention en chute libre

Plus vous scrollez, moins vous concentrez. Chaque contenu est remplacé avant même d’être intégré. Le cerveau devient paresseux, survolant sans absorber. L’ennui, l’attente, la lenteur – jadis fertiles pour la créativité – sont balayés.

Résultat :

  • Difficulté à lire un livre

  • Moins de mémoire

  • Pensée fragmentée

  • Fatigue mentale


 4. Le scroll nous rend-il seuls ensemble ?

Dans les transports, au lit, dans les files d’attente : tout le monde scrolle. Ce geste collectif, quasi hypnotique, nous connecte… mais nous isole aussi. Plus besoin de parler, d’observer, de rêver. Le réel devient un décor secondaire.

Même les repas entre amis sont entrecoupés de micro-absences numériques : un œil sur TikTok, une oreille dans la pièce.


 5. L’art perdu de ne rien faire

Faire défiler un fil, c’est souvent fuir un moment vide. Mais ce vide était précieux. Ne rien faire, c’est penser. C’est laisser surgir une idée, une émotion, un souvenir. Le scroll constant remplit ce vide — mais de quoi ? Souvent, de bruit.

Redécouvrir l’ennui actif, celui qui crée au lieu de distraire, est peut-être un enjeu culturel majeur.


 6. Peut-on s’en libérer ?

Quelques pistes concrètes :

  • Désactiver les notifications

  • Mettre le téléphone en niveaux de gris

  • ⏳ Limiter le temps d’écran avec des applis (ex : Forest, Freedom)

  • Lire sur papier avant de dormir

  •  Sortir sans téléphone, parfois

  • Méditer ou simplement… regarder le plafond

Ce ne sont pas des solutions miracles, mais des gestes de résistance douce.


Conclusion : Reprendre le fil de notre propre pensée

Le scroll infini n’est ni bon ni mauvais en soi. Il est un outil — mais un outil conçu pour captiver, sans fin. Reprendre le contrôle, c’est choisir quand, comment, et pourquoi on l’utilise. Ce n’est pas une guerre contre la technologie, mais une invitation à repenser notre attention comme une ressource sacrée.

Parce qu’au fond, ce qu’on scrolle sans fin, c’est notre propre vie.